Toute personne qui occupe un emploi très stressant connaît ce sentiment : Une date limite importante approche et vous faites de votre mieux pour garder votre équipe sur les rails. Elle compte sur vous pour obtenir des conseils; vous résistez à l’envie de lancer votre ordinateur contre le mur.
Les dirigeants d’entreprise savent qu’il est difficile d’être performant pendant les périodes stressantes, même dans les meilleures conditions. Imaginez maintenant devoir prendre des décisions devant une caméra et sous la loupe des médias friands de hockey à Toronto. C’est exactement ce que Sheldon Keefe, entraîneur en chef des Maple Leafs de Toronto, doit faire chaque jour depuis cinq ans. Nous l’avons récemment rencontré, et il nous a fait part de ses réflexions sur les qualités d’un excellent leader et sur la façon de rallier une équipe vers un objectif commun.
Certes, crier après un arbitre et devenir rouge comme une tomate fait partie de la vie d’un coach et d’un joueur de hockey, mais la meilleure chose que M. Keefe puisse faire en tant qu’entraîneur dans ces moments de grande pression est d’insuffler un sentiment d’espoir à ses joueurs, a-t-il dit.
C’est ce qu’il fait depuis toujours. Il a été embauché à la mi-saison en novembre 2019. L’équipe était aux prises avec des difficultés et tout le monde cherchait des réponses; M. Keefe savait qu’il avait une seule chance de gagner la confiance de ses joueurs.
« À ce moment-là, c’était important pour moi de créer un sentiment d’optimisme, de l’incarner, puis de démontrer que j’avais foi envers mes joueurs », a-t-il dit. « Je devais leur faire comprendre que j’étais là pour les aider à performer. »
Adapter la rétroaction
Savoir comment différents joueurs réagissent à la rétroaction est essentiel. Une approche qui fonctionne avec un membre de l’équipe peut être moins efficace avec d’autres personnes. Comme exemple, M. Keefe nous parle de sa relation avec l’un des joueurs vedettes de l’équipe. Le guider vers l’excellence a été l’une de ses premières tâches. Il s’agit d’un joueur qui performe bien sous la pression, et M. Keefe le savait, puisqu’il l’avait déjà coaché au sein des ligues mineures. Cela dit, il faut trouver un équilibre.
« Il est normal de mettre quelqu’un au défi, et de le faire parfois avec agressivité, mais il est essentiel de rétablir un équilibre le lendemain », mentionne-t-il. « Nous avons tous les deux le même objectif : maximiser son potentiel. » M. Keefe affirme que le maintien du respect et de la confiance aide à préserver une relation collégiale hors de la glace.
De plus, il est conscient qu’il ne peut pas toujours adopter la même approche ni communiquer des nouvelles aux autres joueurs de la même façon. Il se souvient d’un joueur qui éprouvait des difficultés dans les ligues mineures. Plutôt que de s’en prendre à lui pour chaque petit problème, il faisait l’inverse : il le prenait à part au hasard pour lui montrer une vidéo de cinq ou six bons coups. « J’appellerais ça des célébrations », a-t-il dit. « Sa confiance a augmenté et j’ai beaucoup appris sur moi-même, mon style de leadership et ma façon de travailler avec lui. »
L’autre aspect du leadership consiste à reconnaître à quel point votre comportement peut avoir une incidence sur le rendement des autres. Elliotte Friedman, analyste du hockey chez Sportsnet, qui a animé la conversation avec M. Keefe, se souvient d’une histoire qu’il a couverte plus tôt dans sa carrière : un entraîneur débutant arrivé à la mi-saison pour relever une équipe de la LNH dont la performance était insuffisante et la guider vers les séries éliminatoires. Lorsque M. Friedman a demandé à certains des joueurs ce qui avait changé entre l’entraîneur actuel et l’entraîneur précédent, cinq joueurs différents lui ont dit que le nouvel entraîneur prenait le temps de les saluer ou de leur demander comment ils allaient. Parfois, les entraîneurs peuvent regarder de haut un joueur, être en colère ou simplement ignorer quelqu’un, mais ce nouvel entraîneur prenait toujours le temps d’accueillir tout le monde avec le sourire. « C’était énorme », ont-ils dit à M. Friedman.
Gérer les échecs
Lorsque quelque chose ne fonctionne pas au travail, on peut avoir l’impression que les projecteurs sont braqués sur nous et que tout le monde scrute à la loupe chaque décision prise. Le conseil de M. Keefe à ceux et celles qui se trouvent dans cette situation? Être honnête. « Vous devez être très direct quant aux erreurs que vous avez commises et à la façon dont vous allez vous améliorer », a-t-il dit.
Il peut parfois être difficile de rester optimiste dans le vestiaire, mais la meilleure façon d’y arriver est parfois d’essayer, souligne M. Keefe. « Que ce soit avant ou après la pratique, sur le banc ou dans le couloir, j’essaie d’avoir des entretiens proactifs. Je n’attends pas qu’un problème se produise », mentionne-t-il.
« C’est mon type de leadership depuis toujours, et j’essaie de mobiliser mes coachs adjoints pour qu’ils fassent de même. Nous essayons surtout de faire en sorte que les joueurs se félicitent entre eux. Pourquoi? Parce que fondamentalement, ils accordent une plus grande importance à l’approbation de leurs pairs qu’à la mienne. »
Faites-vous confiance
Qu’il s’agisse d’opinions de partisans ou des médias, de fiches statistiques et de vidéos, M. Keefe ne manque pas de renseignements pour l’aider à prendre des décisions. Comme pour toute personne occupant un poste de leader, il est souvent submergé d’informations, et il n’est pas en mesure de traiter le tout.
Selon lui, l’art du coaching ou du leadership consiste à être en mesure de prendre en compte tous ces renseignements et de les combiner à vos instincts, et ainsi prendre une décision éclairée. « Parfois (surtout dans le domaine du sport), vous prenez une décision qui va complètement à l’encontre de ce que les autres renseignements peuvent vous indiquer en raison de votre ressenti, de votre expérience, de ce que vous savez de vos athlètes, de ce que vous savez de l’équipe adverse, des informations à votre disposition à un moment précis ou de l’arbitrage d’une partie. »
Au bout du compte, que ce soit en affaires ou dans le sport, il faut être prêt à assumer ses décisions. « Vous devez bâtir un environnement collaboratif qui prend en compte les renseignements, les idées, les opinions des autres et la science des données, mais être suffisamment déterminé pour prendre la décision appropriée au bon moment. »